Engagé dans le Groupe international de la colonne Durruti
entre le 19 juillet 1936 et le 9 février 1939, Antoine Gimenez raconte. Outre
ses faits d’armes et le quotidien de sa vie d’insurgé, il relate également de
tout autres conquêtes et nous fait par de ses réflexions, commentaires et
analyses.
Ce témoignage exceptionnel nous donne à voir, à
sentir, ces semaines intenses en Catalogne et sur le front d’Aragon.
Les Giménologues sont un groupe d’historiens qui, à
partir du texte qu’Antoine a écrit à Marseille entre 1974 et 1976, ont cherché
à compléter, commenter, confirmer chacun de ses propos. Le résultat de cette
troisième édition encore enrichie constitue le second volume de ce superbe coffret.
Cet appareil critique qui reprend des articles, des entretiens, des extraits
d’autres récits, des documents d’archives, des photos, des cartes, permet de comprendre
chaque événement par l’apport d’autres points de vue et aussi de les resituer
systématiquement dans le contexte national.
On
comprend ainsi que Staline est intervenu dès octobre 1937 pour confisquer l’or
de la Banque d’Espagne en échange d’armes tout en veillant qu’aucune ne
parvienne dans les colonnes anarchistes. On comprend également que la CNT agit
dans le dos des militants dès le mois d’août de cette même année, acceptant de
participer à un gouvernement qui signe le maintient d’une structure d’État et
la fin du collectivisme. On comprend comment la militarisation vise à supprimer
les milices autogérées sans hiérarchie. On comprend comment les manœuvres
contre-révolutionnaires des communistes espagnols et soviétiques vont saboter
le ravitaillement afin de favoriser le retour du commerce privé et déboucher
sur une guerre civile dans la guerre civile. On comprend comment les compromis
avec la politique communiste ont eu raison de la révolution et transformé la
guerre civile en conflit militaire impérialiste. On comprend comment s’est mise
en place une législation répressive au service d’une élimination
politique : des milliers de volontaires antifascistes internationaux se
sont retrouvés pris au piège des procédures arbitraires décidées par Staline.
Chacune de ces notes, longues de quelques lignes à
plusieurs dizaines de pages développe un point qu’Antoine Gimenez a peut-être
seulement évoqué. Celle consacrée à la mort de Durruti est une véritable
enquête qui revient sur les différents témoignages, les différentes théories.
L’hypothèse d’un assassinat par Manzana s’avérant la plus probable.
On comprend le drame vécu par ces femmes et ces
femmes, animés par un idéal généreux, sacrifiés à l’autel de sombres calculs
géopolitiques. Pourtant, près de 40 ans après ces évènements, toujours
convaincu, Antoine Gimenez conclut
que « seule une société libertaire peut sauver les hommes et le monde. »
C’est absolument passionnant.
LES FILS DE LA NUIT
1- Souvenirs
de la guerre d’Espagne
2- À
la recherche des fils de la nuit
Antoine Gimenez et les Giménologues
1002 pages + 1 CD – 22 euros
Éditions Libertalia – Collection « Ceux d’en
bas » – Paris – juin 2016
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