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8 juillet 2017

DEVANT LA CHAISE ÉLECTRIQUE - Sacco et Vanzetti : histoire de l’américanisation de deux travailleurs étrangers

Refusant de se résigner à la condamnation de Sacco et Vanzetti, John Dos Passos prend la plume et rédige ce virulent pamphlet, s’appuyant sur les milliers de page du procès pour démontrer leur innocence et la conspiration frauduleuse qui va les conduire à la chaise électrique.
 
Sacco et Vanzetti ont été déclarés coupables d’avoir volé 15 776 $ et d’avoir tué Frederick Parmenter, caissier, et Alexander Berardelli, garde, à South Braintree, dans le Massachusetts, le 15 avril 1920. Les deux accusés ont été jugés par le juge Webster Thayer à Dedham en juin et juillet 1921, le procès ayant duré sept semaines, et ont été condamnés pour meurtre au premier degré par un jury dont la défense a dit qu’il avait été sélectionné de façon irrégulière et illégale. Le verdict est la peine de mort par la chaise électrique.

John Dos Passos reprend consciencieusement tous les arguments et témoignages utilisés par l’accusation et rappelle comment ils ont été démontés par la défense.
Il extrait des 3 900 pages de transcriptions officielles, les déclarations des 35 témoins appelés à la barre. 7 furent incapables de faire une identification. 22 étaient sûr qui ni Sacco ni Vanzetti n’étaient les hommes qu’ils avaient vus. 4 identifièrent Sacco, 2 à la suite de changements importants par rapport à leurs témoignages précédents, les 2 autres ayant été totalement discrédités. Un seul homme, dont la déclaration dut être « interprétée » identifia Vanzetti. Mais l’accusation affirma que les accusés, par leurs actions, leur attitude et leurs paroles, la nuit de 5 mai, lors de leur arrestation, avaient fait preuve d’un sentiment de culpabilité.

La condamnation de Sacco et Vanzetti, le 14 juillet 1921, choqua une grande partie de l’humanité, comme nulle autre décision de justice depuis que Dreyfus a été envoyé à l’ile du Diable. Les travailleurs, les opprimés, les rouges savent instinctivement ce qui se passe. Mais le citoyen moyen, qui admire la loi et respecte l’autorité, ne le sait pas. C’est pour eux que John Dos Passos a écrit ses pages, publiées et diffusées par le Comité de défense de Sacco et Vanzetti. Il conclu en invitant ses lecteurs à exiger la vérité. Il alterne des chapitres d’une extrême précision pour dévoiler la machinerie mensongère mise en place pour broyer ces hommes à titre d’exemple, et les envolées lyriques plus générales : « Parfois, les circonstances jettent des hommes dans des situations si terribles, entraînent ces petites choses si près des brûlants projeteurs de l'Histoire que ces hommes, ou leur ombre réfléchie dans l'esprit de la foule, deviennent d'immenses symboles. Sacco et Vanzetti sont tous les immigrants qui, par leur sueur et leur sang, ont bâti l'industrie de cette nation, et n'ont eu en retour que le plus petit salaire imaginable, serfs sous le joug de l'ordre social imposé par des hommes au col de chemise amidonné. Ce sont tous les Ritals, les métèques, les ploucs d'Europe centrale, chair à usine que la faim pousse dans les moulins de l'industrie américaine après qu'ils sont passés par le douloureux tamis d'Ellis Island. Ils sont le rêve d'un meilleur ordre social, fait par ceux qui ne supportent pas la loi de la jungle. Ce petit tribunal est le lieu où se concentre l'agitation d'une époque faite de traditions, le centre des regards du monde entier. Sacco et Vanzetti projettent leurs ombres immenses sur les murs de la salle d’audience. »

Ce document est un parfait exemple de ce que peut-être l’engagement total pour une cause, d’un écrivain. Au-delà de l'histoire exemplaire de ces deux hommes, c'est l'arbitraire du pouvoir en général qui est dénoncé ici.




DEVANT LA CHAISE ÉLECTRIQUE
Sacco et Vanzetti : histoire de l’américanisation de deux travailleurs étrangers
John Dos Passos
Traduit de l’anglais (États-Unis) et préfacé par Alice Béja
210 pages – 19,30 euros
Éditions Gallimard – Collection Arcades – Paris – mars 2009
Première publication par le Comité de défense de Sacco et Vanzetti en 1927.

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