Pour quoi faire ?

18 août 2017

LA REVUE DESSINÉE#16

Poursuivant la série d’enquêtes de La Revue Dessinée sur les politiques migratoires qui transforment la Méditerranée en cimetière, Taina Ternoven et Jeff Pourquié, se sont rendus en Sicile pour suivre les efforts des autorités italiennes déterminées à redonner un nom à tous ces corps, retrouver l’identité de tous ces hommes, ces femmes, ces enfants qui ont trouvé la mort en fuyant la misère ou la guerre. 

En 2016, 181 436 personnes sont arrivées sur les côtes italiennes, 5 079 sont mortes pendant la traversée d’après l’Organisation Internationale pour les Migrations. La plupart sont des jeunes hommes de 15 à 25 ans. C’est toute une génération qu’on assassine. L’immigration fait partie de l’histoire de l’Italie puisque nombreux l’ont connue, déclare le commissaire aux personnes disparues, sans toutefois rappeler les campements de réfugiés attaqués par des italiens sans doute sans mémoire. Ce reportage est réalisé avec beaucoup d’intelligence et vient parfaitement compléter ceux des numéros précédents.


Amélie Mougey et Gaëlle Hersent ont suivi pendant une année scolaire les élèves du microlycée de Vitry-sur-Seine, « décrocheurs » accueillis à grand renfort de bienveillance, d’optimisme et de pédagogies alternatives par une équipe d’obstinés, déterminés à relever le défi d’une vraie école pour tous. Le credo de l’équipe « Pour faire mieux, on n’a pas besoin de se sentir mal. » La dureté du monde ils connaissent déjà. En quelques pages, elles ont réussi à nous plonger dans le quotidien de cet établissement et, avec beaucoup de sensibilité et de discrétion, nous permettre d’appréhender les enjeux, les difficultés de ses missions. Le choix des séquences est parfaitement réussi.


L’imposant dossier sur le transhumanisme est extrêmement documenté. Vous avez aimé « Le Meilleur des mondes » d’Aldous Huxley ? Son frère, Julian Huxley, vous le promet. C’est lui qui définit le transhumanisme en 1957 comme « la transcendance de l’homme en déployant de nouveaux possibles pour sa nature ». Améliorer l’homme grâce à la technologie, le rendre plus performant, « meilleur » et immortel, tel est le défi que tentent de relever, notamment, les puissants et richissimes entrepreneurs de la Silicon Valley. Les auteurs font le point sur les recherches en matière de manipulations génétiques, de nanotechnologies, de connections cerveaux-ordinateurs. La réalité semble avoir déjà rattrapé la fiction. Puis, ils donnent la parole aux philosophes pour tenter de donner une conscience à ces sciences. Cette seconde partie, absolument indispensable, donne vraiment toute leur importance à ces informations en les mettant vraiment dans la perspective d’une réflexion complexe et non pas d’une simple indignation un peu stérile.
Jacques Ellul, par exemple, considérait dans les années 50, que la technique n’était plus un ensemble de moyens assignés chacun à une fin, mais un système à part entière sur lequel nous avions de moins en moins de prise. Pour lui, les technologies ne sont pas neutres ou apolitiques, elles nous imposent leur propre logique de performance et d’efficacité. Après avoir désacralisé la nature, l’homme sacralise désormais la technologie.



 

LA REVUE DESSINÉE#16
Collectif
146 pages – 15 euros
Éditions La Revue Dessinée – Paris – Été 2017

Sommaire complet :
http://www.larevuedessinee.fr/Numero-16




Voir aussi :


LA REVUE DESSINÉE #14

 

LA REVUE DESSINÉE #13

 

LA REVUE DESSINÉE #12

LA REVUE DESSINÉE #11

 


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