Recueil de textes, d’entretiens et de discours des
figures majeures du mouvement espagnol Podemos à la conquête d’un pouvoir
citoyen, symbole d’une autre Europe, émancipée du « IVe Reich
financier ».
L’appel de sept pages « Aux Européens » de
Juan Carlos Monederos est un texte fondateur. Souvent cité mais rarement dans
son intégralité, il mérite d’être lu et décortiqué entièrement tant chaque
phrase est percutante. « Nous étions fatigués d’être fatigués. Alors, nous
nous sommes mis en marche. Nous avons compris qu’il fallait bouger une pièce
pour dérégler ces fausses parties d’échec, ces parties nulles où des rois, des
tours et des fous condamnent les pions à attendre et attendre jusqu’à l’usure,
alors que la fin est écrite d’avance. » Il poursuit avec les différentes
prises de conscience, avec la nécessité de reprendre la parole, le pouvoir qui
a été délégué à tort. Il y a déjà dans ces lignes tout un programme politique.
Pablo Iglesias dans « Un tour d’écrou »
puis Luis Giménez dans « L’expérience de la Tuerka » racontent
l’aventure de cette télévision citoyenne née fin 2010 dans un garage de Madrid,
diffusée sur internet, appliquant le précepte : « Si tu n’as pas
accès aux médias, deviens toi-même le média. » Des professeurs de la
faculté des sciences politiques et de sociologie de Madrid, également impliqués,
plus tard, dans le mouvement des Indignés au printemps 2011, décident de créer
un lieu où seraient débattues des questions de sociétés et des sujets
politiques autrement que dans les médias dominants. Le succès est tel que les
politiciens professionnels sont rapidement obligés de venir débattre avec eux
et que les télévisions officielles finissent par inviter ses animateurs sur
leurs plateaux.
Quelques exemples de monologues, textes brefs,
incisifs et argumentés, suivent pour illustrer les contenus de cette véritable
école de communication politique.
Íñigo Errejón raconte ensuite le passage de La
Tuerka à Podemos en janvier 2014. Ce récit est riche d’enseignements : il
ne sert à rien d’avoir raison si personne ne nous comprend, en disant
« nous sommes » nous sommes en train de postuler une nouvelle
identité, quelle est la dernière fois que tu as voté en y croyant ? ,…
Ce nouveau parti est aussi né de l’observation des
expériences de transformations politiques en Amérique Latine dont les acteurs
viennent des couches populaires. Même s’il est structuré avec une direction, il
repose avant tout sur ses cercles. Son ambition est électorale mais propose
tout d’abord d’abandonner les étiquettes qui nous déchirent depuis des
décennies, d’oublier nos idéologies pour en fonder une nouvelle en répondant à
des questions concrètes, en élaborant un programme : une réforme fiscale
pour que les riches payent, la protections des droits sociaux, un audit de la
dette, la fin du passage d’un ministère à un poste décisionnel dans une
multinationale (banque, laboratoire,… Il s’agit avant tout de faire de la
politique pour changer la vie des gens.
Le problème des recueils de textes est qu’ils se
répètent parfois, inévitablement, d’où la difficulté certaine d’en rendre
compte, mais cette variété de témoignages permet de parfaitement appréhender
l’émergence de ce mouvement politique, ses grands principes moteurs, son mode
de fonctionnement, de se forger son propre avis sur sa finalité et ses
méthodes.
PODEMOS - Sûr que nous pouvons !
130 pages – 10 euros
Indigène Éditions – Montpellier – mai 2015.
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