Pour quoi faire ?

12 juillet 2016

UNE COLÈRE NOIRE – Lettre à mon fils


Ta-Nehisi Coates, né en 1975, écrit à son fils de 15 ans, révolté par les meurtres impunis de noirs par des policiers. Il lui décrit sa propre prise de conscience, enfant, que son corps pouvait à tout instant être purement et simplement détruit parce que noir.




Selon lui, les américains vouent un tel culte pour la démocratie qu’il inhibe leur faculté de comprendre qu’ils l’ont trahi. Ils croient en une réalité de la « race », nait du racisme et non l’inverse, car peuple nouveau ils ont fondé leur mythologie nationale sur l’invention, le « Rêve » d’un peuple blanc, refusant d’admettre que leurs richesses viennent du pillage du travail, de la terre, de la liberté et de la vie même.
 
Ta-Nehisi Coates raconte comment ses parents à coup de ceinturon l’ont élevé dans la violence et la peur, résignés à le préparer à survivre dans ce « Rêve ». Dans la rue, il comprit tôt que seule la rage pouvait donner un (illusoire) sentiment de sécurité et de pouvoir. Quant à l’école, elle lui apparu comme un autre écran de fumée, en complète déconnexion de la réalité.
Heureusement, animé d’une curiosité insatiable et entouré des nombreux livres de son père, bibliothécaire, il lu tout, concernant les luttes des noirs, l’histoire de l’Afrique. Il trouva, chez Malcom X. notamment, les réponses qu’on lui cachait. Admis comme étudiant en droit à l’Université d’Howard qui abrite La Mecque, machine qui concentre et transmet aux étudiants « l’énergie sombre des peuples africains », il finit de forger sa conscience politique. Plus tard, il doute de cette construction d’un « Rêve » noir et questionne la logique de ces volontés réciproques de s’approprier la civilisation.

Si au temps de l’esclavage, la loi ne protégeait pas les Noirs, aujourd’hui elle justifie les fouilles et les arrestations. La haine renforce le sentiment identitaire. La police est le reflet de l’Amérique dans ses peurs et ses phantasmes. La sécurité est plus importante que la justice et justifie la destruction du corps noir.
Venant de Baltimore où les parents enseignent la terreur à leurs enfants, il découvre New-York où l’on transmet maîtrise et domination. Puis, il arrive à Paris où sa couleur est moins un signe distinctif mais où, enfin, il est avant tout « américain ».

Ce récit sincère et juste, complété par une analyse fine et perspicace est un témoignage fort qui, par ces mises en perspective successives, rend parfaitement compte de la situation des noirs aux États-Unis et de son évolution sur plusieurs générations.

UNE COLÈRE NOIRE – Lettre à mon fils
Ta-Nehisi Coates
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Thomas Chaumont
Préface d’Alain Mabanckou
208 pages – 17 euros
Éditions Autrement – Paris – janvier 2016
Publication originale en juillet 2015 par Spiegel & Grau
 

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