Pour quoi faire ?

5 septembre 2016

TOPO – numéro 1


La Revue Dessinée décline désormais son concept à destination des adolescents et proposera aux moins de 20 ans avec Topo, tous les deux mois, des reportages en bandes dessinées.

 Le dossier sur Youtube et ses incontournables youtubeurs en intéressera vraisemblablement plus d’un. L’approche critique est habile car plutôt que de développer un discours moralisateur, il nous est proposé de suivre une jeune fille de 14 ans qui veut justement devenir youtubeuse et de découvrir la réalité d’un système à travers ses rencontres. En s'identifiant au narrateur, le lecteur marquera ses propres distances face aux faits.

Mais sans doute sa curiosité sera-t-elle moins immédiatement éveillée par le sujet sur les ventes d’armes aux États-Unis même si Benjamin Adam a mis tout son talent et son art au service du propos. Il réussit comme jamais à synthétiser par une utilisation symbolique de l’image qui, associée au texte de Guillemette Faure, dans une construction qui met en avant les chaines de causalité, résume très efficacement de longs discours. La reproduction de la page 42 permettra de parfaitement saisir toute la puissance du procédé :



(Nous l’ôterons bien évidemment sur simple demande des ayant droits.) On apprend que ce pays de 321 millions d’habitants compte 357 millions d’armes à feu et que dans certains coins, les enfants de 12 ans ont plus de facilité à en trouver que des livres. L’origine du second amendement remonte à une crainte importée par les colons anglais protestants qui redoutaient d’être persécuté par leur roi catholique et avaient formé des milices. La NRA est une association incontournable du lobby pro-armes. Par son intermédiaire, c’est l’industrie de l’armement qui finance les campagnes de tous les candidats. Il est impossible aux États-Unis aujourd’hui de faire campagne contre les armes.

Si le portrait d’Angela Merkel (sans image !) est d’une si froide objectivité qu’il laisse peu de prise à la critique, le dossier sur les jeux vidéo fait froid dans le dos. Le constat de leur caractère extrêmement stéréotypé, profondément raciste et sexiste ne surprendra pas mais le sort réservé à ceux qui tentent de dépasser ces codes (insultes sur les réseaux sociaux, diffusion de leur numéro de téléphone personnel et harcèlement,... ) est tout simplement terrifiant.

Le récit des syriens obligés de quitter leur pays est touchant et bien conçu. Cependant une relecture plus attentive aurait évité qu'un homme aient deux filles puis qu'une seule six pages plus loin !

L’accroche de « L’apocalypse selon Hollywood » est prometteuse : le cinéma catastrophe joue sur les peurs ancestrales et les États-Unis sont devenus les sauveurs de la planète. Mais hélas il n’en sera plus question dans les sept pages suivantes qui se contentent d’énumérer quelques films emblématiques de la science fiction,  du « Jour où la terre s’arrêta » à « E.T. », en se référant à chaque fois à « Indépendance Day », avant de conclure qu’il n’y a que l’argent qui compte ! Tout bonnement incompréhensible !

Quelques petits problèmes, donc, avec ce premier numéro un peu décevant. Avis mitigé même s’il est globalement plutôt positif. Trop de démagogie et pas assez de rigueur ne permettront pas à cette revue de devenir un véritable outil pour former des esprits critiques.



TOPO – numéro 1
Collectif
148 pages – 12,50 euros
Éditions Topolino  – Paris – septembre-octobre 2016
toporevue.fr

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