Pour quoi faire ?

1 novembre 2017

L’AMOUR À TROIS : Alain Soral, Éric Zemmour, Alain de Benoist

Nicolas Bonanni propose une lecture critique des thèses anti-universalistes, inégalitaires et misogynes d’Alain Soral, Éric Zemmour et Alain de Benoist. Ça tombe bien, nous n’avions guère envie de les lire.

Le « trouple » (couple à trois) dénonce la dégringolade de la société traditionnelle, rigide, patriarcale, à une société moderne, liquide, égalitaire qui a remplacé l’Église par le Marché.
Un profond mépris des femmes les rassemble. Ils proposent aux perdants du capitalisme de faire payer l’addition à celles-ci en mythifiant une virilité « perdue ». Ils fondent cette discrimination sur l’anatomie qui définirait les différences de mentalité.
Le racisme de l’extrême-droite a évolué depuis les années 70, déterminant des identités collectives, homogènes et statiques non plus sur une apparence physique mais sur une appartenance « civilisationnelle » (culturelle, nationale, religieuse) mais qui recouvre presque exactement les caractères expliqués hier par la biologie.
Leur anticapitaliste est essentiellement symbolique et idéaliste. Ils ne cherchent pas à défaire l’exploitation, l’aliénation et l’impérialisme, mais à réenchanter le monde capitaliste avec une dose de « valeurs », de religion et de morale, c’est-à-dire d’ajouter une aliénation à une autre.
Pour Soral, le combat oppose sa vision hélléno-chrétienne à la « vision juive » du monde. Chez Zemmour c’est la culture européenne qui affronte le « rouleau compresseur américain ». De Benoist défend la culture européenne des origines contre l’égalitarisme monothéiste.
« Avec son idéalisme identitaire, le trouple ne renversera pas le capitalisme, mais exacerbera les tensions entre les communautés religieuses, tout en égarant quelques révoltés sincères. »
Ils font de mai 68 un récit biaisé, celui d’une révolution libérale-libertaire réussie. Ce qui leur permet de jeter à la poubelle tout l’héritage des Lumières, 1789 avec 1968, la Modernité avec la Révolution. Pour eux la Modernité a accouché d’une religion de substitution au christianisme : droits de l’homme + économie de marché + universalisme des Lumières + apologie de l’égalité + consumérisme + refus de toute limite et de frontière.
« L’étendard du trouple, c’est la Tradition : transcendance, différentialisme et hiérarchie. »

Cette nouvelle extrême droite réactionnaire cherche à séduire au-delà de ses terres habituelles. Contre l’égalitarisme et l’horizontalité, ils vantent l’élitisme et font l’apologie de l’inégalité sous toutes ses formes : racisme, sexisme, nationalisme, libertarianisme, transhumanisme, apologie de la hiérarchie, de la guerre, de la domination,… Ils mènent le « combat culturel » sur internet, dans la presse confidentielle et dans les médias, tandis que Marine Le Pen et Florian Philippot poussent l’offensive dans les urnes.


Les intermèdes potaches n’étaient sans doute pas nécessaires, tout comme les digressions de l’auteur sur ses propres opinions (pas inintéressantes par ailleurs). Bref exposé, limpide et documenté, l’auteur l’illustrant avec de très nombreuses citations ce qui lui permet également de préciser et distinguer les théories de chacun. De qui savoir à qui nous avons à faire.



L’AMOUR À TROIS : Alain Soral, Éric Zemmour, Alain de Benoist
Nicolas Bonanni
72 pages – 3 euros
Éditions Le Monde à l’envers – Grenoble – Novembre 2016

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