Pour quoi faire ?

2 janvier 2019

PETIT TRAITÉ D’ÉCOLOGIE SAUVAGE

Les dirigeants de la planète ont enfin décidé d’adopter la cosmogonie animiste des indiens d’Amazonie. Angela Merkel annonce que puisque les peuples ont massivement répondu « non » au référendum leur demandant s’il fallait continuer à utiliser les coquillages cauris comme monnaie internationale, le troc est désormais le seul moyen d’échange officiel, et Vladimir Poutine que le gouvernement russe prépare la légalisation du mariage entre personne appartenant à des espèces différentes.


L’anthropologue jivaro Wajari Tsamarin présente à l’Assemblé nationale le résultat de ses recherches, après trois années de terrain dans une ferme bretonne utilisant encore les techniques d’élevage occidentales traditionnelles. Il remet en question la vision généralement admise que la cosmogonie occidentale s’organisait autour des valeurs sacrées de rentabilité, de profit, de compétition et d’accumulation indéfinie d’objets. En effet, ses travaux démontrent que la productivité à l’hectare de l'élevage intensif est sensiblement égale, voire inférieure, à celle des fermes modernes où les vaches broutent simplement de l’herbe dans les près, en raison des investissements invraisemblables que demandent les techniques traditionnelles, en contradiction totale avec les discours de rentabilité et de profit. Il émet donc l’hypothèse qu’un concept ancien de « nature » subsiste, que les agriculteurs traditionnels chercheraient à dominer par la force.
En postface, Alessandro Pignocchi livre quelques clés de comprehension en présentant la philosophie jivaro qui fait l’économie de la distinction entre nature et culture. Loin de prétendre nous imposer leur vision, il imagine à quoi ressemblerait le monde si on empruntait « quelques outils de composition aux Jivaros » dans un mouvement de « mise à distance ». Il cherche à nous entraîner à repérer nos propres outils de composition du monde et à  envisager que d’autres outils existent. L’exercice est réussi, avec beaucoup d’humour et sans aucune intention moralisatrice. Ce pas de côté invitera assurément à la réflexion. Et si l’on ne s’arrêtera pas la prochaine fois qu’on écrasera un hérisson, pour le manger et permettre à son esprit protecteur de récupérer son âme et de la réincarner (ce qui n'était pas l'objectif de cette bande dessinée), le souvenir de ce décalage devrait persister longtemps après avoir refermé le livre et changer quelque peu notre regard.



PETIT TRAITÉ D’ÉCOLOGIE SAUVAGE
Alessandro Pignocchi
130 pages – 14 euros
Éditions Steinkis – Paris – Mars 2017

Le blog de l’auteur : https://puntish.blogspot.com/



Voir la suite : 

LA COSMOLOGIE DU FUTUR

MYTHOPOÏESE

 

Et aussi, du même auteur : 

LA RECOMPOSITION DES MONDES

 

Voir aussi :

 

 

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