Dictionnaire de pensée critique, destiné aux enfants.
De A comme « aimer » à Z comme « zine », ce petit ouvrage propose une petite centaine de définitions de termes théoriques (égalité, entraide, respect mutuel, humilité), idéologiques (fascisme, anarchisme, racisme) ou pratiques (banques, troc, police, parti politique). Le ton est résolument militant, ce qui est suffisamment rare pour être souligné, parmi une offre éditoriale unanimement orientée vers l’éducation civique, même si l’ensemble pourra sembler très inégal.
Certaines entrées sont vraiment pertinentes : « Pauvreté : C’est la situation vécue par les personnes qui manquent d’argent pour payer le nécessaire pour répondre à leurs besoins essentiels, une situation où leurs droits humains et leur dignité ne sont pas respectés. Elle est le résultat du capitalisme. Pour s’enrichir les capitalistes font vivre cette situation à de plus en plus de personnes, en volant les ressources naturelles, en augmentant les coût des logements, en diminuant les services offerts gratuitement, etc. » Quelques autres semblent avoir été un peu rapidement rédigées et mériteraient un développement. Ainsi, c’est sans doute un peu réducteur de présenter les banques comme l’endroit où « tes parents se font voler l’argent qu’ils gagnent avec leur travail ». D’autres, au contraire, sont même très fines et audacieuses : « Le genre, c'est l'identité que tu choisis parce que c'est avec elle que tu te sens le mieux. »
Il en ressort malgré tout une certaine vision de la société : « Le capitalisme est un système d'inégalités où un petit groupe de personnes s'enrichissent toujours plus pendant que la pauvreté et la faim menacent les autres personnes. » « Faim : […] Dans le capitalisme, la terre n’appartient pas à celles et à ceux qui pourraient y cultiver des céréales, des légumes et des fruits, mais à celles et ceux qui ont assez d’argent pour la payer. » « Fascisme : […] Lors des krachs boursiers et des crises économiques, le capitalisme a besoin de la violence et du fascisme pour garder le contrôle de la société. » « Gouvernement : C’est l’institution basée sur la croyance des adultes d'un chef autoritaire pour prendre les décisions à leur place. » « Police : […] Elle défend les privilèges des plus puissants et applique durement la loi pour les autres. » « Parti politique : c'est un groupe de personnes privilégiées qui cherchent à prendre le contrôle du gouvernement en trompant des gens. Ces personnes font des promesses qu'elles ne réaliseront pas. Elles permettent au capitalisme et aux oppresseurs de continuer leur domination en faisant croire aux adultes qu'il n'y a rien d'autre à faire que voter pour l'un des partis politiques lors des élections. » Etc.
Bien entendu, face à ces constats, un contre-projet de société est proposé, dessiné à travers les définitions de barricade, assemblée, coopération, centre social autogéré, écologie sociale, entraide, grève, rébellion,… « L’anarchisme, c’est de faire de tes désirs des réalités, de créer un monde libre où tous les enfants, comme toi, vivent dans la joie, sans faim ni misère. »
Les ouvrages de pensée critique destinés à un jeune public sont si rares qu’ils méritent d’être signalés ici. Celui-ci, par sa forme, permettra de répondre à des interrogations ou d’engager des discussions. Un outil très intéressant à utiliser en famille, en classe, en atelier.
Ernest London
Le bibliothécaire-armurier
DICTIONNAIRE ANARCHISTE DES ENFANTS
Jorge Enkis et collectif Emma Goldman
80 pages – 8 euros
Éditions de l’Atelier de création libertaire – Lyon – Novembre 2022
www.atelierdecreationlibertaire.com/Dictionnaire-anarchiste-des-enfants.html
Publié pour la première fois par Editorial Autodidacta, Santiago du Chili, 2020, puis par le Collectif Emma Goldman, Saguenay, Nitassinan, 2021.
À partir de 10 ans ?
Voir aussi :
La définition des banques comme l’endroit où « tes parents se font voler l’argent qu’ils gagnent avec leur travail » est loin d'être réductrice ! Elle est, au contraire, tout à fait pertinente, lorsque l'on sait que les banques commerciales prêtent de l'argent qu'elle ne possèdent pas ! Cet argent est uniquement garantit par le fruit du travail de celui ou de celle qui contracte le crédit. C'est exactement ce que dit la définition.
RépondreSupprimer" « Le genre, c'est l'identité que tu choisis parce que c'est avec elle que tu te sens le mieux. » ... Aude Vidal n'a pas tort de se demander si "L'auto-définition/identification et la reconnaissance d'un troisième genre, non-binaire, ne nieraient-elles pas le genre comme RAPPORTS SOCIAUX de sexe, en faisant une caractéristique individuelle?
RépondreSupprimerLe féminisme du choix, en postulant que tous les choix effectués librement par des femmes sont des choix féministes, n’est-il pas devenu le point de rencontre entre féministes libérales et nouvelles féministes radicales?"
Cf. https://www.syllepse.net/la-conjuration-des-ego-_r_72_i_779.html