Le général Métaxas décrète la loi martiale et prend le pouvoir en Grèce après les grandes grèves du 4 août 1936. Il décide de mater les rébètes, musiciens souvent originaires de la région de Smyrne perdue au profit de la Turquie en 1922, « coupables d’unir Orient et Occident en un chant hypnotique », accusés du « ramollissement moral de [la] société ».
Markos Vamvakaris sort de prison et retrouve ses amis Artémis, Stavros, Chien et Batis. Ensemble, ils s’enivrent, boivent et fument au narghilé du haschich de Bursa, avant de partir, avec leurs bouzoukis et leurs baglamas pour une grande tournée, de téké en téké, qui se terminera, comme toujours, à l’aube.
« Rejoins-nous mangas !
Laisse le monde à la porte !
et ensuite ami…
on brûlera la porte ! »
Très inspiré, David Prudhomme nous offre une tranche de vie de joueurs et danseurs de rébétiko, avec leurs états d’âmes d’écorchés vifs, leurs joies partagées, leur mélancolie communicative, leur frénésie difficilement contrôlable. Il réussit avec maestria à retranscrire leur état d’esprit ainsi que le contexte sociologique, politique, économique qui fut le leur. L’ambiance de ces concerts plus ou moins improvisés est fort judicieusement retranscrite, avec une tension graphique d’une intense sensibilité : clair obscur, visages sombres mais illuminés, mouvements suggérés, paroles écrites en bleu sur les corps,…
Le paradoxe du succès de cette musique, véritable institution, est aussi évoqué : « Il ne pouvait pas nous aimer quand nous étions vivants, dans nos eaux sombres. Une fois sortis de notre jus, nous sommes devenus comestibles. »
Ernest London
Le bibliothécaire-armurier
RÉBÉTIKO (La mauvaise herbe)
Nouvelle édition
David Prudhomme
104 pages – 22 euros
Éditions Futuropolis – Paris – Avril 2025
www.futuropolis.fr/9782754844079/rebetiko.html
Première édition : 2009
Du même auteur :
Rébétissa
Pour le plaisir :
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