18 novembre 2020

CAS D’ÉCOLE - Histoires d’enseignants ordinaires

Portraits d’enseignants, plutôt exemplaires, investis dans leur travail, mis en difficulté par des collègues dysfonctionnants, des parents intrusifs, une direction incompétente, une hiérarchie implacable jusqu’à l’absurde, incapable d’entendre, d’accompagner et de reconnaître ses erreurs, maltraitante, jusqu’au drame parfois. Et aussi, portrait d’un ministre « qui saborde l’éducation nationale depuis plus de dix ans ».

Sabrena, Jean, Cécile, Annie, Jean-Pascal et leurs collègues sont abandonnés par l’administration, dans des situations dont ils ne sont, la plupart du temps, pas responsables, harcelés parfois : « Assurer la continuité du service public », tel semble être le seul mot d’ordre. Soumis à une soudaine pression à laquelle ils ne sont pas préparés, livrés à eux même, la plupart craquent et souffrent sans pouvoir réellement se défendre. Ceux qui ne décident pas d’en finir ou de changer de métier, continuent d’enseigner avec abnégation.
Jean-Michel, après avoir effectué toute sa scolarité « dans un établissement privé catholique huppé », gravit rapidement les échelons en bon « technocrate carriériste » : professeur de droit, recteur à moins de 40 ans, directeur général de l’enseignement scolaire puis ministre en 2017. C’est lui qui propose de détecter les « élèves problématiques » dès la maternelles, sous Sarkozy, qui décrédibilise les enseignants en affirmant qu’ils continuent d’utiliser la méthode globale pour l’apprentissage de la lecture, qui fait passer des « évaluations inadaptées, truquées » pour démontrer le succès du dédoublement des classes de CP… impossible à mettre en oeuvre faute de moyens financiers et humains, qui se tait lorsque des enseignants se suicident mais dénonce « une insoutenable violence » lorsque d’autres se débarrassent de manuels scolaires périmés lors d’une manifestation,… Son mépris, son arrivisme, son incompétence, ses manipulations sont dénoncés par le rappel de simples faits et déclarations.


Avec ces récits, Remedium rend hommage à ces enseignants dévoués qui subissent de plein fouet le management libéral imposé à l’école publique. Immersion en bande dessinée.

 

 

CAS D’ÉCOLE
Histoires d’enseignants ordinaires
Remedium
100 pages – 15 euros
Éditions des Équateurs – Paris – Septembre 2020
https://editionsdesequateurs.fr/enLibrairie/oo/CasDecole

 

 TROIS QUESTIONS À REMEDIUM

 

Ernest London : Professeur des écoles vous même, quel a été l’évènement déclencheur de ce projet ?

Remedium :
J'ai longtemps cherché à la manière d'évoquer mon métier en bandes dessinées, sans jamais trouver d'angle qui me permette de couvrir tout ce que je souhaitais évoquer. Et puis est arrivé le suicide de Jean Willot, en mars 2019. J'ai alors, d'une manière instinctive, réalisé "L'histoire de Jean", la première histoire du recueil. Avant même de l'avoir fini, je me suis rendu compte que ce style et cette manière de procéder pourrait se décliner à toutes les histoires que je souhaitais évoquer.


Ernest London : Comment avez-vous procédé ? Avez-vous enquêté dans les écoles concernées, rencontré les protagonistes, échangé avec eux « en distanciel » ?

Remedium : Cela dépend des histoires. Je connaissais personnellement certains enseignants du recueil et j'ai ainsi pu obtenir leur témoignage facilement. Pour d'autres, je me suis rapproché d'eux et ai confronté leur témoignage aux autres sources existantes. Enfin, dans le cas d'enseignants particulièrement médiatiques et parfois disparus comme Christine Renon ou Jean Willot, j'ai utilisé le témoignage de proches, mais également le travail de la presse.

Ernest London : Il n’est jamais question des syndicats dans vos récits. Cette absence reflète-t-elle une absence sur le terrain ?

Remedium : Les syndicats, ce sont les gens qui les composent. Et, malheureusement, de moins en moins d'enseignants se syndiquent ou s'investissent dans les syndicats. C'est d'autant plus dommage que des syndicats bien représentés et forts pourraient sans aucun doute d'éviter de nombreuses dérives évoquées dans le livre. A noter aussi que les syndicats apparaissent parfois en filigrane dans certaines histoires, accompagnant des enseignants dans leur démarche. Mais dans la réalité comme dans le livre, leur présence est souvent discrète, car il s'agit quand même de mettre le combat humain au centre, comme dans le cas de "l'histoire de Jacques", cet enseignant déplacé de son école pour ses dessins et ses engagements. 

 

 

 

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