Après l’invasion du Liban par l’armée israëlienne, soutenue par les États-Unis, Georges Ibrahim Abdallah, dirigeant des Fractions armées révolutionnaires libanaises (FARL) , est condamné pour complicité dans l’assassinat de diplomates de ces deux pays. Emprisonné depuis 40 ans, il est « le plus vieux prisonnier politique de l’Union européenne ». Pierre Carles et Malo Kerfriden retracent l’enquête préparatoire au tournage du film Who wants Georges Abdallah in jail ?
Avec l’appui de la presse et des journaux télévisés de l’époque, ils reviennent tout d’abord sur le contexte : la guerre menée par Israël au Liban à partir de 1972 puis les deux exécutions à Paris.
Puis, Pierre Carles rencontre, en Algérie, Mohand Hamami, ancien militant d’action direct qui a été chargé de revendiquer l’assassinat de Yacov Barsimantov pour le compte des FARL. Il a réussi à échapper toute sa vie à l’arrestation : jamais les autorités algériennes ne l’ont livré à « l’ex-puissance coloniale », le considérant comme « un combattant révolutionnaire pro-palestinien » et non pas comme un « terroriste ». Il raconte en détails leur mode d’organisation et défend leurs « principes », leur « éthique », puisque, même lorsqu’ils commettaient des attentats à la bombe, ils refusaient de toucher des innocents.
Pierre Carles raconte ensuite l’arrestation de Georges Ibrahim Abdallah en 1984 et sa condamnation à 4 ans de détention pour usage de faux papiers, association de malfaiteurs et possession d'armes, ce qui provoque le mécontentement des États-Unis qui considèrent cette peine trop « légère ». Ceux-ci se constituent partie civile, multiplient les pressions et lors d'un second procès en 1987, Abdallah est jugé pour complicité d'assassinat et condamné à la réclusion criminelle à perpétuité. Depuis 1999, il peut déposer des demandes de libération conditionnelle, mais chaque fois les États-Unis interviennent pour qu’elles soient rejetées. En 2013, l’une d’elles est tout de même accordée mais le Ministre de l’Intérieur Manuel Valls refuse de signer l’arrêté d’expulsion. Abdallah reste en prison.
L’auteur se rend également au Liban pour rencontrer les frères Abdallah. Lors de la vague d’attentats à Paris, en 1986, ils ont été accusés, notamment par Edwy Plenel dans les colonnes du Monde, qui reprenait des informations policières , d’en être les auteurs, bien qu’ils n’aient alors pas quitté leur pays. En réalité la France refusait de rendre à l’Iran les milliards de dollars investis dans son programme nucléaire à l’époque du Shah… Dénoncé à tort d’avoir été « le chef d’orchestre », Georges Ibrahim Abdallah a surtout payé pour cette étiquette de « terroriste » alors que même Yves Bonnet, ancien directeur de la DST, considère « qu’il avait le droit de revendiquer des actes commis par les FARL comme des actes de résistance ». Quand aux les médias français, ils se montrent pour le moins discrets sur cette histoire.
Encore une bande dessinée documentaire qui permet de saisir les tenants et les aboutissants d’une affaire enterrée.
Ernest London
Le bibliothécaire-armurier
DANS LES OUBLIETTES DE LA RÉPUBLIQUE
Georges Ibrahim Abdallah
Pierre Carles et Malo Kerfriden
128 pages – 22,50 euros
Éditions Delcourt – Collection « Encrages » – Paris – Mai 2024
www.editions-delcourt.fr/ingerence-us-peine-de-mort-lente-pour-george-ibrahim-abdallah
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