S’il distingue les pratiques de la pêche artisanale de celles de la pêche industrielle, il pointe les pratiques souvent illégales de celle-ci, notamment des armateurs hollandais qui vident littéralement les fonds marins, et déploie tous les arguments pour rendre compte des problèmes dans leur complexité.
Il évoque la formation du plancton dans les rivières, base de la chaîne alimentaire, parfois empêché d’atteindre la mer par des barrages, la pollution des côtes par les polluants agricoles, industriels et domestiques, les modifications de la structure de l’océan, sa température, sa salinité, son acidité, en raison du réchauffement climatique, qui engendrent, par exemple, la prolifération des poulpes – vingt fois plus en un an près de Concarneau – et la migration des poissons vers les eaux plus froides des pôles. Il souligne aussi l’exceptionnelle capacité de reproduction des poissons qui augure un nouveau foisonnement de la vie marine à condition qu’on respecte les quotas et diminue le nombre de bateaux. Loin d’être optimale, la situation des mers de l’Union européenne est moins dégradée que d’autres, grâce à la politique commune de la pêche qui fixe des quotas soutenables. Toutefois, cette recherche d’un « maximum économique » est contesté car reste une norme productiviste sans justification écologique. De plus, « 90 % des poissons consommés dans l'union européenne sont issus de l'importation ».
Avec la prise de conscience de la baisse nécessaire de consommation de viande, enclenchée dans les années 2000, les appétits se sont reportés vers le poisson. Les saumons d’élevages sont nourris avec de la farine de poisson… produite en Afrique de l’Ouest. « Les ressources marines du Sud sont vidées pour alimenter les fermes du Nord », provoquant une catastrophe écologique et sociale, responsable de la migration. De plus, l’élevage intensif a des conséquences désastreuses sur l’environnement et les consommateurs. Tout au long de l’album, il donne la parole à différents protagonistes : économistes, universitaires, pêcheurs, la navigatrice Isabelle Authissier, des industriels, notamment pour sourcer et rapporter les informations les plus techniques… et aussi une mouette, qui lui permet de prendre régulièrement de la hauteur ! Les illustrations à l’aquarelle d’Olivier Martin, très réalistes, avec quelques rares licences métaphoriques et une utilisation parcimonieuse de graphiques, servent ce reportage avec beaucoup de justesse.
Après avoir abordé ces différents sujets, Maxime de Lisle conclut son exposé en un mot : réduire. « Réduire la consommation de poisson. Et réduire les impacts de la pêche. »
Une enquête synthétique qui donne beaucoup de clés de compréhension, autant économiques qu’environnementales, de la mise en danger des océans et de l’importance vitale de les préserver.
Ernest London
Le bibliothécaire-armurier
ON A MANGÉ LA MER
Une enquête au cœur de la crise de la pêche en France
Maxime de Lisle et Olivier Martin
128 pages – 22 euros
Éditions Futuropolis – Paris – Février 2025
www.futuropolis.fr/9782754835534/on-a-mange-la-mer.html
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