9 juillet 2017

LA VIE DE GALILÉE

Bertold Brecht met en scène la vie de Galiléo Galiléi et nous invite à réfléchir sur les rapports de la science avec le pouvoir, sur la vérité et le mensonge.
 
Galilée, naïvement, croit tout d’abord pouvoir convaincre avec l’évidence des faits, grâce à la lunette qu’il vient de fabriquer et lui a permis de découvrir les phases de Vénus, les satellites de Jupiter et leurs rotations. Il croit en la raison. Mais, face à l’obstination de l’Église et notamment de l’Inquisition qui ne tiennent pour vérité que les Écritures, il se résigne au silence. Lorsqu’un nouveau Pape, Urbain VIII, féru de mathématiques, est nommé, il pense le moment enfin venu de reprendre ses expériences et d’exhiber ses preuves. Il n’échappera pourtant au bûcher qu’en renonçant à ses affirmations.

« Qui ne connait la vérité n’est qu’un imbécile. Mais qui, la connaissant, la nomme mensonge, celui-là est un criminel ! » proclamait-il. Pourtant la simple vue des instruments de torture lui ôtera tout courage. Ce n’est pas non plus pour pouvoir poursuivre secrètement ses recherches qu’il se rétractera devant le tribunal de l’Inquisition le 22 juin 1633, même si c’est finalement ce qu’il fera. Son aphorisme est fameux : « Malheureux le pays qui a besoin de héros » mais on oublie toujours de préciser que c’est en réponse à la déception de son élève devant son attitude, qui soupirait : « Malheureux le pays qui n’a pas de héros ». Homme de chair il ne se cherche pas d’excuse et acceptera de se soumettre. Alors, mieux vaut-il avoir les mains sales ou vides ? Faut-il mourir pour une idée ?

En remettant en cause les théories aristotéliciennes et le modèle de Ptolémée, Galilée a introduit le doute. En divulguant les résultats de ses recherches en langue « vulgaire » et non seulement en latin, il l’a semé dans tous les esprits mettant en péril le pouvoir des princes, des propriétaires et du clergé qui tenaient la population « dans un brouillard nacré de superstitions et de vieux dictons qui couvre leurs machinations ». Leur société ne peut être fondée sur le doute mais seulement sur la foi. C’est pourquoi ils « commandent à la terre de se tenir immobile pour que leurs châteaux ne dégringolent pas ! »
Pourtant, les nouvelles cartes du ciel permettent aux navires d’aller plus vite. Pour ne pas prendre de retard sur les Hollandais, les villes maritimes du Nord de l’Italie les réclament. L’Inquisition rejettera la théorie tout en acceptant les cartes. Intérêt oblige !

La communauté scientifique n’est pas épargnée non plus. Galilée lui reproche d’être présomptueuse, de ne pas chercher à « ouvrir une porte à la sagesse infinie mais de poser une limite à l’erreur infinie ». Elle oublie trop souvent que son but consiste à « diminuer les misères de la vie humaine » et regrette qu’il n’existe de serment, comme celui d’Hyppocrate pour les médecins, de promesse de n’utiliser la science que pour le bien de l’humanité.


Bertold Brecht, avec cette biographie théâtrale, pose la question de la vérité face au pouvoir totalitaire. Son Galilée reste un homme, avec toutes ses frilosités et ses audaces, ses contradictions. Très loin d’un simple portrait héroïque, cette lecture alimentera bien des débats intérieurs.





LA VIE DE GALILÉE
Bertold Brecht
Traduction d’Eloi Recoing
146 pages – 8,99 euros
Éditions de L’Arche – Paris – juin 1999

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