Il grandit à Maidières où son père travaille à l’usine des Forges. Au petit-déjeuner, il rêve d’exotisme devant la caravane de chameaux du paquet de chicorée. Il est en admiration devant son grand frère Lucien, trimardeur et buveur d’eau, anticlérical, antimilitariste et anarchiste.
Au début de la Première Guerre mondiale, alors que le front n’est qu’à quelques kilomètres, la famille ouvre une cantine clandestine où les soldats viennent se détendre et dont il apprécie les conversations. Le récit de son séjour de cinq mois en Algérie est nettement moins laconique que dans Parcours, où elle était « résumée » en 2 pages et demi. Ici, plus de 30 pages nous permettent de découvrir cette expérience assez peu commune pour un enfant de 12 ans. Puis, il rejoint sa famille à Lyon et l’atelier d’étamage de l’usine où travaille son père et son frère René, pour échapper à l’école religieuse qu’il ne supporte plus, passe de boulot en boulot. Blessé puis démobilisé, Lucien les retrouve à nouveau et les querelles d’opinion reprennent, l’éclairant au passage : « Selon Lucien, les gouvernants étaient de cyniques crapules, qu'ils soient de la Triplice ou de l'Entente, des gens soumis aux ordres des profiteurs de guerre et des marchands de canons. Passe pour le Kaiser et son cousin le tsar, mais les autres, voilà qui était vraiment renversant pour moi qui croyais que nos dirigeants étaient aussi honnêtes que les apôtres et aussi savants que les plus grands savants, qu'ils avaient tous lu le Grand Livre où figure le plan du progrès, qu'ils connaissaient non seulement l'Histoire, mais l'avenir de l'Histoire, que leur savoir était immense, que par amour du peuple et de la patrie, ils avaient tellement lu et réfléchi pour le bien de toute l’Humanité que leurs grosses têtes si elles avaient été un peu moins solides, auraient pu éclater. » Il commence à suivre son frère à des réunions syndicales où il entend une causerie du camarade Thioulouze sur Fernand Pelloutier qui l’impressionne beaucoup. Dès lors, son « évolution vers la révolte » est très rapide. Ses doutes aussi.
Les années suivantes sont plus rapidement survolées.
Ce volume éclaire la conscientisation de Georges Navel, depuis les propos critiques entendus de la bouche de poilus de 14 jusqu’aux premiers meetings et aux premières lectures. Comme s’il s’agissait de montrer qu’il ne pouvait, du fait de sa condition sociale, que s’indigner et s’insurger.
Ernest London
Le bibliothécaire-armurier
Du même auteur :
PARCOURS
PASSAGES
Georges Navel
Préface de Roméo Bondon
384 pages – 22 euros
Éditions L’Échappée – Paris – Février 2025
www.lechappee.org/collections/lampe-tempete/passages
Première édition : 1982
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire