Dans la Russie du Tsar, un paysan subvient aux
besoins de sa famille en cultivant son lopin de terre, tout en laissant paître
ses bêtes, de temps à autre et en toute discrétion, dans les prés de la
Barynia, lui subtilisant parfois fruits et bois, comme tout le monde au
village, jusqu’au jour où le frère de celle-ci nomme un régisseur au domaine
pour éviter ces pillages. Dès lors, la misère s’installe, la terreur règne et
les amendes pleuvent. Impossible de subsister sur l’espace trop réduit de ses
parcelles personnelles. Impossible de payer si l’on se fait prendre en train de
chaparder et impossible de nourrir sa famille si l’on règle alors sa dette en
journée de travail.
Aussi quand la Barynia décide de mettre en vente le
domaine, les paysans s’organisent pour faire une offre supérieure à celle du
régisseur. Leur tentative de gestion collective échoue face à l’incapacité de
concilier les désirs de chacun. Tous se retrouvent avec une part de terrain
proportionnelle à son apport en numéraire. Notre paysan qui a pu emprunter à
son riche beau-frère devient tyran à son tour et va mettre à l’amende ses
voisins trop pauvres.
Après cette longue introduction en forme de
réflexion sur la propriété privée, le conte commence réellement. Désormais
désireux de posséder toujours plus, notre paysan part à la recherche d’un
royaume si vaste qu’il pourra y acquérir des terrains à très bon marché. Après
plusieurs semaines de marche, il parvient chez les Bashkirs qui lui proposent
d’échanger contre mille roubles tout le terrain qu’il pourra parcourir en une
journée. La conclusion que nous tairons est d’une grande sagesse, réponse
définitive aux prétentions des hommes.
On regrette que la période collectiviste ne soit pas
plus analysée. Elle est abandonnée comme s’il était évident qu’une entente raisonnable
était irréaliste. Mais il ne s’agit certes pas là du propos de l’auteur.
Les adaptations en bandes dessinées ont le mérite d’élargir
le public de certains textes, surtout lorsqu’ils ont confiés à des
illustrateurs de renom. Nous conseillerons cependant la lecture du texte
original :
CE QU’IL FAUT DE TERRE À L’HOMME
Martin Veyron, d’après Léon Tolstoï
144 pages – 22 euros
Éditions Dargaud– Paris – janvier 2016
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