21 octobre 2024

NOUS SOMMES LE CRI D’UN PEUPLE

Photographe, journaliste indépendant et écrivain, Loez, familier du Kurdistan, a suivi les traces de Sêal Cudî et Arîn Mirkan, de leur nom de guerre, deux combattantes au sein du mouvement de résistance du peuple kurde.
Fort d’une grande culture de l‘histoire de la région et de celle des forces politiques en présence, il inscrit son récit dans son contexte historique précis, sans toutefois assommer ses lecteurs de références érudites inutiles. Il rencontre leur famille et leur proche, plonge dans les archives du mouvement pour reconstituer leur enfance, comprendre leur engagement, suivre leur parcours, jusqu’à leur mort, en martyre.
Il place sa démarche dans la continuité de celle du journaliste John Gibler qui revendique dans L’ÉVASION D’UN GUÉRILLERO - Écrire la violence : « une écriture qui écoute, écriture rebelle ». « Les ouvrages sur les Kurdes se sont multipliés depuis quelques années. Mais la seule théorie ne suffit pas pour apprendre d'un peuple et de ses luttes. Il en faut aussi la poésie et les rêves, la dimension émotionnelle et sensible. » explique-t-il. On pense aussi à Joseph Andras, bien sûr, et à son travail sur la chanteuse kurde Nûdem Durak, à Georges Orwell et ses souvenirs de Catalogne.
Familier du Kurdistan pour s’y être rendu trois fois en 2014, puis en 2018, en 2021, il complète son récit de brefs exposés historiques, géopolitiques et idéologiques, notamment sur la jineolojî, « la science des femmes », et plus généralement le confédéralisme démocratique.

La question de la langue et de la culture est omniprésente dans ces récits, avec l’importance de la presse, depuis la revue Hawar éditée à partir de 1932 en Syrie qui utilise pour la première fois les caractères latins, l’interdiction de la pratiquer à l’école et dans l’espace public, les carnets que sont invité·es à tenir les combattant·es et qui seront archivés, véritable travail de production et de sauvegarde de la mémoire. De la même façon, « danse et chant sont une pratique de résistance culturelle ».
Loez interroge également l’omniprésence de la figure d’Öcalan, souvent dénoncée comme culte de la personnalité, proposant quelques explications, comme par exemple que « le fait d'assigner le rôle de chef à un homme emprisonné protège ses actuel·les dirigeant·es et freine l’émergence de figures individuelles qui pourraient être tentées d'accaparer le pouvoir ».

Avec cet ouvrage, Loez propose de découvrir l’histoire du Kurdistan et des luttes de son peuple, à partir du destin tragique de deux combattantes. Un travail d’enquête respectueux.

Ernest London
Le bibliothécaire-armurier


NOUS SOMMES LE CRI D’UN PEUPLE
Histoire de Sêal et Arîn, combattantes kurdes
Loez
242 pages – 20 euros
Éditions Ici-bas – Collection « Les réveilleurs de la nuit » – Toulouse – Avril 2024
editionsicibas.fr/livres/nous-sommes-le-cri-dun-peuple-histoire-de-seal-et-arin-combattantes-kurdes


Voir aussi :

LA RÉVOLUTION COMMUNALISTE

NÛDEM DURAK




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