Ta-Nehisi Coates, né en 1975, écrit à son fils de 15
ans, révolté par les meurtres impunis de noirs par des policiers. Il lui décrit
sa propre prise de conscience, enfant, que son corps pouvait à tout instant
être purement et simplement détruit parce que noir.
Ta-Nehisi Coates raconte comment ses parents à coup
de ceinturon l’ont élevé dans la violence et la peur, résignés à le préparer à
survivre dans ce « Rêve ». Dans la rue, il comprit tôt que seule la
rage pouvait donner un (illusoire) sentiment de sécurité et de pouvoir. Quant à
l’école, elle lui apparu comme un autre écran de fumée, en complète
déconnexion de la réalité.
Heureusement, animé d’une curiosité insatiable et
entouré des nombreux livres de son père, bibliothécaire, il lu tout, concernant
les luttes des noirs, l’histoire de l’Afrique. Il trouva, chez Malcom X.
notamment, les réponses qu’on lui cachait. Admis comme étudiant en droit à
l’Université d’Howard qui abrite La Mecque, machine qui concentre et transmet
aux étudiants « l’énergie sombre des peuples africains », il finit de
forger sa conscience politique. Plus tard, il doute de cette construction d’un
« Rêve » noir et questionne la logique de ces volontés réciproques de
s’approprier la civilisation.
Si au temps de l’esclavage, la loi ne protégeait pas
les Noirs, aujourd’hui elle justifie les fouilles et les arrestations. La haine
renforce le sentiment identitaire. La police est le reflet de l’Amérique dans
ses peurs et ses phantasmes. La sécurité est plus importante que la justice et
justifie la destruction du corps noir.
Venant de Baltimore où les parents enseignent la
terreur à leurs enfants, il découvre New-York où l’on transmet maîtrise et
domination. Puis, il arrive à Paris où sa couleur est moins un signe distinctif
mais où, enfin, il est avant tout « américain ».
Ce récit sincère et juste, complété par une analyse
fine et perspicace est un témoignage fort qui, par ces mises en perspective
successives, rend parfaitement compte de la situation des noirs aux États-Unis
et de son évolution sur plusieurs générations.
UNE COLÈRE NOIRE – Lettre à mon fils
Ta-Nehisi Coates
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Thomas
Chaumont
Préface d’Alain Mabanckou
208 pages – 17 euros
Éditions Autrement – Paris – janvier 2016
Publication originale en juillet 2015 par Spiegel
& Grau
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