Le 4 juillet 1910, jour de la fête de l’Indépendance, 16 000 personnes sont réunies à Reno, Nevada, pour assister au match de boxe entre James Jeffries et Jack Johnson, qui va confirmer le titre de premier champion du monde poids lourds noir de ce dernier, au grand dam des défenseurs de la Color line.
Ce récit biographique, découpé en quinze chapitre correspondant à chacun des quinze rounds, articule avec adresse les séquences de la vie du champion depuis son enfance à Galveston (Texas) où ses parents étaient esclaves, jusqu’à sa mort brutale. Il a « boxé partout et de toutes les manières, […] en bleu de travail dans des rues désertes et des terrains vagues , en costume trois pièces dans un wagon de marchandises et dans une cave, une main attachée dans le dos ». Il a même participé à un battle royal les yeux bandés.
Youssef Daoudi raconte aussi d’autres combats, évoque d’autres champions, depuis John L. Sullivan, premier à tracer « la ligne de couleur » et Tommy Burns qui refusa longtemps d’affronter Jack Johnson, jusqu’à ce que l’appât du gain le fasse céder… et perdre son titre de champion du monde poids lourds, le 26 décembre 1908, à Sydney ! Ce jour-là, Jack Johnson est le seul à applaudirent sa victoire, derrière une rangée de policiers. Dès lors, il s’agissait de convaincre Jeffries de sortir de sa retraite pour rétablir « la ligne ».
Le climat de haine continue, dans l’enceinte de Reno, est parfaitement rendu, alimenté par la presse, avec des tribunes de Jack London notamment, et des caricatures racistes fidèlement reproduites ici, jusqu’aux insultes et invectives permanentes dans l’enceinte sportive, aux menaces de mort au cas où il en sortirait vainqueur. Mais lorsqu’il balance un crochet, « c’est la frustration qui frappe » : « Je ne leur pardonnerai jamais la façon dont ils nous ont traités, mon peuple et moi. » Sa victoire déclenchera des émeutes raciales dans tout le pays ! La diffusion du film du match restera très longtemps interdite.
Le Président Roosevelt en personne voudra interdire la boxe pour se débarrasser de lui. Successivement marié à plusieurs femmes blanches, le gouvernement s’en prendra sournoisement à lui par ce biais. Ne pouvant le faire battre sur le ring, il le fera tomber pour proxénétisme, au nom de la loi Mann sur la traite des blanches. Il s’exile alors à Paris. Puis dans un dernier combat, à La Havane, il accepte de perdre – et de perdre son titre ! – en échange de la promesse d’une autorisation de rentrer aux États-Unis pour revoir sa mère. Mais à peine la frontière franchie, il est jeté en prison.
Il raconte lui-même une partie de son histoire, sur scène et en public, exercice qu’il a pratiqué pendant quelques années. Ce qui permet d’alterner narration à la première personne et récit, de multiplier les points de vue, dans cet album déjà abondamment rythmée par les nombreux flash-back. Les poèmes d’Adrian Matejka donnent une saveur certaine au récit et le choix restreint des couleurs, rouge et orange, renforce le caractère percutant des images, le parti pris extrêmement expressif.
Le destin de Jack Johnson illustre une des pages sombres de l’histoire des États-Unis.
Ernest London
Le bibliothécaire-armurier
Le Président Roosevelt en personne voudra interdire la boxe pour se débarrasser de lui. Successivement marié à plusieurs femmes blanches, le gouvernement s’en prendra sournoisement à lui par ce biais. Ne pouvant le faire battre sur le ring, il le fera tomber pour proxénétisme, au nom de la loi Mann sur la traite des blanches. Il s’exile alors à Paris. Puis dans un dernier combat, à La Havane, il accepte de perdre – et de perdre son titre ! – en échange de la promesse d’une autorisation de rentrer aux États-Unis pour revoir sa mère. Mais à peine la frontière franchie, il est jeté en prison.
Il raconte lui-même une partie de son histoire, sur scène et en public, exercice qu’il a pratiqué pendant quelques années. Ce qui permet d’alterner narration à la première personne et récit, de multiplier les points de vue, dans cet album déjà abondamment rythmée par les nombreux flash-back. Les poèmes d’Adrian Matejka donnent une saveur certaine au récit et le choix restreint des couleurs, rouge et orange, renforce le caractère percutant des images, le parti pris extrêmement expressif.
Le destin de Jack Johnson illustre une des pages sombres de l’histoire des États-Unis.
Ernest London
Le bibliothécaire-armurier
LE DERNIER DEBOUT
Jack Johnson, fils d’esclave et champion du monde
Youssef Daoudi et Adrian Matejka
Traduit de l’anglais (États-Unis) par Sidonie Van Den Dries
328 pages – 30 euros
Éditions Futuropolis – Paris – Avril 2024
www.futuropolis.fr/9782754841863/le-dernier-debout.html
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