L’attentat de Karachi au Pakistan, le 8 mai 2002, qui couta la vie à 14 personnes, a laissé entrevoir un possible système de commissions et de rétrocommissions adossé à un contrat d’armement qui aurait contribué au financement de la compagne d’Édouard Balladur. Survenu le jour du retour au pouvoir de Jacques Chirac, il aurait été destiné à faire pression sur lui parce qu’il avait suspendu des versements.
La libération des infirmières bulgares détenues en Libye a été conclu contre la promesse par Nicolas Sarkozy de livraison d’une centrale nucléaire pour alimenter une usine de dessalement. Anne Lauvergeon, PDG d’Areva confirme lors d’une audition à l’Assemblée Nationale que « c’est une des application très intéressante du développement du nucléaire civil ».
Depuis avril 1939, la fabrication, le commerce, le transport et l’exportation du matériel de guerre ne fait l’objet d’aucun débat mais est décidé par le Ministre de la Défense sur simple décret-loi.
Des informations capitales qui permettent d’entrevoir les mécanismes en jeu, sont livrées par Jean-Pierre Lenoir, ex-agent de la DGSE, qui rédige son ouvrage « L’État trafiquant » sur scène et en lit des extraits à ses collègues :
« Pour conserver son indépendance, La France, troisième exportateur d’armes, se trouve dans la nécessité de faire financer ses programmes par des clients étrangers, c’est-à-dire vendre à tout prix avant de mettre en fabrication. »
La juxtaposition des propos est accablante. Elle révèle les contradictions, les mensonges. Les procès-verbaux des conversations téléphoniques, toutes en non-dits, suintent le mystère et la dissimulation.
Ce n’est pas sans un certain plaisir que nous surprenons les proches de Nicolas Sarkozy, Thierry Gaubert et Brice Hortefeux, empêtrés dans les accusations de financement de la campagne présidentielle de 2007 par Mouammar Kadhafi.
Prenant un peu de recul par rapport à ces intrigues, la pièce se termine par un questionnement sur la pertinence de la dissuasion nucléaire après la chute du mur de Berlin. Dans une longue intervention, Michel Rocard expliquait en 2014 que le maintien de l’OTAN fut vécu comme une humiliation par les Russes, que « Poutine par l’autoritarisme et la remilitarisation, nous fait payer ». De même « la gifle » infligée à la Turquie en lui refusant l’entrée dans l’Europe, l’a renvoyée chercher ailleurs des alliances. « Nous fûmes fous. Et suicidaires. » « Maintenant, le vrai danger, c’est la prolifération. »
Par la théâtralisation de son enquête, Nicolas Lambert tisse des liens et brosse un tableau affligeant d'une logique d'État au service du « complexe militaro-industriel ».
LE MANIEMENT DES LARMES
Nicolas Lambert
Dessins de Otto T.
130 pages – 10 euros
Éditions L’Échappée – Paris – Août 2016
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