21 février 2024

ÉMILE POUGET ET LA RÉVOLUTION PAR LE SABOTAGE

Avoir avoir commencé à raconter HISTOIRE DU SABOTAGE 1 – Des Traîne-savates aux briseurs de machines, Victor Cachard propose ici une sélection de textes, d’articles et de brochures, beaucoup reconstituées à partir des archives, afin de documenter la théorisation du sabotage par Émile Pouget (1860-1931) et les syndicalistes révolutionnaires.

Après quelques rappels biographiques introductifs et une rapide contextualisation des activités militantes de Pouget, depuis son arrivée à Paris en 1876 : période post-Commune de Paris puis de l’adhésion des anarchistes au syndicalisme révolutionnaire, avec une « réinterprétation critique de la propagande par le fait », ses premiers articles sont reproduits et commentés. À l’automne 1897, il rend compte du congrès de Toulouse des syndicats ouvriers de France où sont acclamés « bougrement » les pratiques du boycottage et du « sabottage » : « Il faut que les capitalistes le sachent : le travailleur ne respectera la machine que le jour où elle sera devenue pour lui une amie qui abrège le travail, au lieu d'être, comme aujourd'hui, l'ennemie, la voleuse de pain, la tueuse de travailleurs. » (Rapport de la Commission du Boycottage) « Le sabottage, c'est le tirage à cul conscient, c'est le rattache d'un boulot, c'est le grain de sable roublardement fourré dans l'engrenage minutieux pour que la machine reste en panne, c'est le coulage systématique du patron… Tout ça pratiqué en douce, sans faire de magnes, ni d’épates. » (Le Père Peinard n°60, du 12 au 19 décembre 1897). Puis, dans la perspective de l’édition d’une brochure (qui ne verra jamais le jour) compilant des conseils pratiques, des renseignements techniques et des exemples de sabotage, il fait appel à témoignages, qu’il publiera au fil des numéros de son journal.
Un chapitre est consacré aux débats autour de cette pratique controversée. Pouget répond notamment à Jaurès qui l’accuse d’être immorale. Durant la grève des PTT, une « chronique du sabotage » est ouverte dans les colonnes de La Guerre sociale. Une « Circulaire confidentielle » est également reproduite et largement commentée, préparant un passage à l’acte coordonné au niveau national. Le récit le plus intéressant reste toutefois celui du sabotage de la mobilisation, quittant le terrain des luttes sociales pour « dénoncer l'enroulement forcée de la population civile dans une guerre de pouvoir qui lui est étrangère ». La revue Le Mouvement anarchiste, de la Fédération communiste anarchiste (FCA), publie notamment la brochure « Ce que l’on peut saboter sur un aéroplane ». D’autres documents sont également reproduits, comme « En cas de guerre » ou « Brochure rouge », imprimée en 1913, véritable manuel insurrectionnel.

En ouvrant les archives du sabotage, Victor Cachard revient sur les origines modernes du sabotage qui demeure aujourd’hui « le parent pauvre de la pensée révolutionnaire », « comme si la pureté de l'idéal défendait que l'on parle des moyens d'agir contre des infrastructures qui maintiennent bien, quant à elles, une guerre perpétuelle ».

Ernest London
Le bibliothécaire-armurier



ÉMILE POUGET ET LA RÉVOLUTION PAR LE SABOTAGE
Recueil de textes présenté par Victor Cachard
240 pages – 16 euros
Éditions Libre – Paris – Octobre 2022
www.editionslibre.org/produit/emile-pouget-et-la-revolution-par-le-sabotage-textes-inedits-selectionnes-par-victor-cachard/



Du même auteur :

HISTOIRE DU SABOTAGE 1 – Des Traîne-savates aux briseurs de machines

 

 

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