Il donne tout d’abord une définition philosophique de la haine, non seulement comme négation et plaisir anticipé d’anéantir l’autre, mais comme affirmation de soi et constitution de soi par négation et destruction de l’autre : « Il faut qu’il ne soit pas, pour que moi je sois. », « Je hais donc je suis. ».
Alternent des pensées brèves et des formes dialoguées plus développées dans lesquelles il explique comment la haine est « injectée » pour permettre le combat contre des ennemis désignés et leur élimination. Cependant, dès lors que disparaissent les champs de bataille, la haine n’est plus nécessaire. Le pilote du bombardier qui détruisit Hiroshima n’éprouva pas plus de haine que les rescapés à l’égard des Américains. Les soldats ne voient désormais pas plus les « millions de cadavres et de déserts qu’ils fabriquent » que les ouvriers d’usine les produits finis de leur travail à la chaîne. Les émotions dépendent de l’appareillage technique. Bientôt, des instruments déclencheront des instruments menant la guerre, ordinateurs incapables de haïr. Or, cette carence causera notre perte car ceux qui se haïssaient pouvaient un jour cesser et peut-être même commencer à s’aimer, tandis que « les ordinateurs ne peuvent arrêter le combat, puisque ne les habite aucune haine qu’ils puissent remiser ». « La fin de la haine pourrait bien signaler la fin de l’humanité. »
Nous ne manquerons pas de chroniquer prochainement ses titres précédents.
LA HAINE
Günther Anders
Traduit de l’allemand et préfacé par Philippe Ivernel
114 pages – 6 euros
Éditions Rivages poche – Collection « Petite bibliothèque » – Paris – Mars 2009
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