S’ils admettent les manifestations d’hostilités à l’égard des juifs, et les dénoncent, ils contestent l’ampleur de cette « vague ».
Aujourd’hui, en France, l’antisémitisme prend différentes formes :
- Quelques nostalgiques du IIIe Reich, quelques douzaines de néonazis sans avenir politique qui tanguent des croix gammées sur des synagogues.
- Une poignée de négationnistes, provocateurs intellectuels, souvent liés au Front national, qui cherchent uniquement à semer le doute concernant un fait historique.
- Le vieux fonds antisémite du « pétainisme transcendantal », « résidu fantomatique » de « l’antisémitisme d’opinion » dominant avant la guerre, composante raciste du sentiment anti-populaire qui stigmatise toujours les derniers arrivants et s’est donc déplacé vers d’autres cibles.
- L’hostilité d’une partie de la jeunesse française noire et arabe, qui relève d’un amalgame entre la répression anti-palestinienne de l’État d’Israël et une image tronquée des juifs français, assimilés aux organisations qui se prétendent « représentatives » de la « communauté juive » et apportent un soutien absolu à tout ce que fait l’État d’Israël. « Israël se définit comme un État juif, ce qui produit une sorte de fusion entre le mot « juif » et la pratique gouvernementale israélienne. » Plutôt de parler de « l’État hébreu », Israël se proclame l’État des juifs du monde entier. « Ce qu’éprouve cette jeunesse populaire n’est pas de l’antisémitisme, mais plutôt une hostilité « politique mal politisée » à ce qu’elle perçoit comme la position des juifs de France. » Accuser d’antisémitisme ce sentiment politique est une « opération de stigmatisation ». Il s’agit de semer la méfiance et l’hostilité envers la jeunesse populaire, d’établir une frontière avec la petite bourgeoisie blanche éduquée, une « ségrégation sociale », « procédés de classe assez traditionnels ». Il s’agit également d’établir « une unité de fond entre le soutien apporté au combat des Israéliens contre la barbarie « intégriste » arabe, et, chez nous, la lutte contre les jeunes barbares des banlieues ».
Les propagandistes instrumentalisent l’extermination des juifs d’Europe par les nazis, comme un « brouillard jetés sur les trois axiomes fallacieux » :
- juif = État d’Israël
- palestinien = intégriste musulman
- jeune des banlieues = intégriste musulman
Les auteurs analysent plusieurs chaînes rhétoriques à l’oeuvre :
- L’anticapitalisme a pour noyau l’antiaméricanisme qui a pour centre l’antidémocratisme dont le pivot est l’antisémitisme !
- L’anti-impérialisme c’est aujourd’hui l’antiaméricanisme qui est lui-même l’anticapitalisme qui est l’antisémitisme via le classique fantasme du « financier juif » !
- La critique des médias porte sur des journalistes dont beaucoup sont juifs !
Ils dissèquent ensuite plus précisément les mécanismes qui animent les discours des « traqueurs d’un antisémitisme fantasmé ». Rigoureusement, ils démontent le système, montrent « de quelle colline parlent les accusateurs, quel est leur passé, quelles sont leurs raisons politiques, quels avantages personnels ils tirent de leurs mensonges, quels sont leurs liens et leurs complicités ».
Analyse régulièrement confirmée par l’actualité.
L’ANTISÉMITISME PARTOUT
Aujourd’hui en France
Alain Badiou et Éric Hazan
66 pages – 10 euros
La Fabrique Éditions – Paris – Mars 2011
D’Alain Badiou :
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