Le dossier économique de ce numéro estival est
consacré aux assurances. L’origine du principe remonte à la plus haute
antiquité, en Mésopotamie où la perte d’un chameau dans une caravane était
mutualisée.
À Babylone au XVIIIème siècle avant J.-C. c’est l’ensemble des
membres d’un convoi fluvial qui prenait en charge les vols ou les naufrages
individuels.
Lorsque les contrats d’assurance sont apparus, des
clauses sont venues délimiter la prise en charge du risque.
Après l’ouragan Andrew qui toucha la Floride et la
Louisiane en 1992 et ruina sept compagnies d’assurance, l’idée naquit de faire
supporter le risque aux marchés financiers : c’est l’invention des Cat
Bond. Mais les clauses sont telles que les indemnisations rarement
déclenchées : seulement 8 sur les 232 Cat Bond créés entre 1994 et
2013 !
On est dans un pur modèle libéral où les profits
sont privatisés tandis que les pertes systématiquement prises en charge par les
États bien obligés de reconstruire… tout en continuant à payer les
intérêts ! Si tout cela n’est pas très clair, le mieux est de lire cet
article particulièrement technique mais rendu abordable par la clarté des
propos de Carol Suhas et l’intelligence vulgarisatrice des illustrations de
Pierre Lecrenier.
Le bédéaste Benjamin Flao accompagne la délégation
du CCFD au Bouthan pour la confédération annuelle internationale sur le Bonheur
Intérieur Brut. Il raconte l’origine de ce projet. Déjà, le premier code légal
du pays indiquait dès 1729 que « si le gouvernement ne parvient pas à
créer le bonheur de son peuple, il n’y a aucune raison que le gouvernement
existe. » C’est le roi qui, après avoir traversé à pied le pays pour
consulter la population, a instauré une nouvelle politique organisée autour de
neuf indicateurs signalant régulièrement les insuffisances à réduire. Dans la
tradition bouddhiste le bonheur n’est pas pensé comme une succession de petits
moments heureux éphémères mais comme un état de plénitude durable.
Si cette expérience est encore récente et sans doute
imparfaite, elle a le mérite de proposer un courageux changement de paradigme
car comme disait Einstein : « On ne résout pas un problème avec les
modes de pensée qui l’ont engendré. »
Sans tombé dans le piège de l’enthousiasme béat,
Benjamin Flao parvient à conserver une distance critique et bien faire la part
des choses.
Si on parle beaucoup du nucléaire civil le nucléaire
militaire est plus rarement évoqué. Ce dossier revient sur les premiers essais
en Algérie puis leur transfert en Polynésie. De tout temps ils nous ont été
garantis sans danger mais pourtant de plus en plus éloignés de la métropole.
Depuis la chute du mur de Berlin, la dissuasion nucléaire
ne semble plus justifiée : elle n’a plus de cible et elle n’empêchera pas
des attentats comme ceux du Bataclan. Pourtant aucune décision politique ne
vient remettre en cause son principe. Le Parlement n’est jamais consulté sur
les choix stratégiques, d’investissement en nouveau matériel ou nouveau
chantier. Ce sont des milliards qui sont dépensés chaque années sans contrôle
et parfois en pure perte comme avec le chantier Mégajoule inauguré par Manuel
Vals en 2014, avec 10 ans de retard. Projet ambitieux en théorie mais qui ne
semble pratiquement pas être réellement fonctionnel avant très longtemps… s’il
l’est un jour !
Curieusement Greenpeace, à la pointe de la
contestation du nucléaire civil, est très silencieux et complètement absent des
débats sur le nucléaire militaire. Pourtant de nombreuses irradiations ont été
constatées et plusieurs procédures son en cours de la part des personnels. Sans
parler des assassinats toujours inexpliqués de deux techniciens, en 1996 à
Brest.
Ce secteur se développe sans rendre compte à
personne ni sur les risques, ni sur ses coûts, ni sur son utilité réelle. Les
auteurs posent les bonnes questions tout en soulignant que les réponses
continuent de se faire attendre.
À noter également le magnifique travail graphique de
Jorge González sur les récits parallèles de deux nageurs, l’un juif et déporté
à Auschwitz, l’autre collaborateur.
Les livraisons de la Revue Dessinée ne se
ressemblent pas. Le champ des sujets abordés est vaste, leur approche
toujours rigoureuse et accessible à la fois.
Sommaire plus complet :
http://www.larevuedessinee.fr/Numero-12
LA REVUE DESSINÉE #12
Collectif
228 pages – 15 euros
Éditions La Revue Dessinée – Paris – juin 2016
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