Par son silence obstiné, son refus de dénoncer et condamner l’entreprise d’extermination des juifs, le pape Pie XII a-t-il failli à sa mission de vicaire du Christ sur terre ?
Inspiré du témoignage d’un officier SS, Gernstein, qui tenta d’entraver au péril de sa vie les desseins d’Hitler dans sa « solution finale », en divulguant des informations auprès du Vatican, Rolf Hochhuth met en scène l’affrontement entre les principes moraux et les enjeux diplomatiques.
Un prêtre, n’écoutant que sa conscience, tente par tous les moyens de pousser le Pape et son entourage à intervenir. Mais le souverain pontife, voyant en Hitler le seul rempart capable de protéger l’Europe du communisme, refuse de l’affaiblir. Il se taira, même lorsque les Allemands arrêteront les juifs à Rome, sous ses propres fenêtres, même lorsqu’ils déporteront ceux qui se sont convertis au catholicisme.
Les hypocrisies et les efforts rhétoriques pour justifier les contractions se prêtent parfaitement à la forme théâtrale. La progression dramatique s’appuie sur un sens du dialogue particulièrement affiné. Conflits moraux de certains ecclésiastiques, stratégies diplomatiques de certains autres, crédulité des juifs de ne courir aucun risque, cruauté des miliciens, sadisme du docteur d’Auchwitz,… tous les aspects contextuels nous sont présentés, avec force précisions historiques.
Est-ce que ne rien faire est aussi grave que de participer au crime ? Moins pardonnable ? L’Église catholique s’est-elle rendue complice de la mort de six millions de juifs ? La pièce ne répond pas mais elle donne les éléments pour juger.
LE VICAIRE
Rolf Hochhuth
Traduit de l’allemand par F. Martin et J. Amsler
80 pages – 19 euros.
Éditions du Seuil – Paris – novembre 1963
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