Sans complexe, il reproche à la presse de répandre « des ragots perfides », des calomnies, alors même qu’il a dépensé des millions pendant vingt ans pour qu’elle « se tienne coite » « Pour vraies qu’elles soient, il importe peu. Ce sont des calomnies dès lors qu’on les prononce contre un roi. » Il considère en effet que les actes d’un roi « ne sauraient être critiqués sans blasphème, puisque Dieu les a vu s’accomplir depuis le tout début sans déplaisir de les voir commettre ni les désapprouver ».
Il souligne l’hypocrisie des nations européennes dont les représentants se sont réunis en convention à Berlin et ont convenu de faire de lui le « Contremaître Régisseur en Chef de l’État du Congo ».
Si le rapport de la Commission d’Enquête exigée par l’Angleterre et dont il cite quelques éloquents intitulés de chapitre, l’agace quelque peu, il se défend point par point et avec beaucoup de mauvaise foi, et jubile d’avoir « réussi à battre les Yankees » qui furent les seuls à reconnaître le drapeau de l’État libre du Congo. « Leur prétentieuse République, cette Championne autoproclamée qui se targue de promouvoir des Libertés du Monde est la seule démocratie de l’histoire à avoir prêté sa puissance et son influence à l’établissement d’une monarchie absolue ! »
Sans scrupule ni remord, il justifie chacun des crimes commis en son non, tous plus abominables les uns que les autres : amputation de la main droite pour ceux qui n’ont pas rapporté suffisamment de caoutchouc, cannibalisme, crânes utilisés comme ustensiles, etc, et regrette surtout l’apparition du Kodak, « calamité douloureuse », qui permit aux photos de « se répandre comme un traînée de poudre ».
Quelques documents historiques et la préface apportent des précisions sur le contexte historique qui vit un pays quatre-vingt fois grand comme la Belgique perdre en 24 ans 10 millions d’habitants, soit la moitié de sa population. Puissant pamphlet contre le colonialisme dont l’éditeur nous signale qu’il eut à l’époque de sa publication en 1905 une véritable incidence sur l’opinion publique, preuve que les livres sont bel et bien des armes.
LE SOLILOQUE DU ROI LÉOPOLD
Mark Twain
Traduit de l’américain par Freddy Michalski
80 pages – 12 euros
Éditions L’Oeil d’or – Paris – Avril 2018
http://www.loeildorenligne.com/
Sur la partie française du pays, voir aussi :
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire