Marcos explique qu’après la chute du mur de Berlin et la disparition de l’Union soviétique, ce n’est plus une puissance impérialiste, au sens classique du terme, mais un « pouvoir extra-national, le pouvoir du capital financier » qui s’est imposé. La « quatrième guerre mondiale » oppose les partisans de la globalisation à tous ceux qui lui font obstacle. « L’idéal de la globalisation est un monde transformé en grande entreprise et géré par un conseil d’administration constitué du FMI, de la Banque mondiale, de l’OCDE, de l’OMC et du président des États-unis. Dans un tel contexte, les gouvernants de chaque État ne sont que les représentants de ce conseils d’administration, des sortes de gérants locaux. Ils ne défendent pas les intérêts des citoyens, mais les intérêts et les valeurs de ce conseil d’administration mondial. » À côté des résistances médiatiques comme le soulèvement zapatiste, le mouvement social français de novembre-décembre 1995, la protestation contre l’OMC à Seattle, d’autres, plus discrets, moins spectaculaires, formulent des propositions plus achevées, plus réfléchies pour lutter contre la globalisation : les budgets participatifs ou l’initiative pour l’instauration de la taxe Tobin sur les transactions financières par exemple.
La mise à sac que subit le Mexique depuis la conquête de 1492 s’étend désormais au monde entier, avec la privatisation de tout ce qui est public et collectif, des biens communs comme le savoir, les connaissances et la vie même.
« Le zapatisme, plus qu’un exemple à suivre, est un symptôme. » L’EZLN s’est soulevée pour réclamer la démocratie, la liberté et la justice pour tous les mexicains et pas seulement pour les indigènes. Ceux-ci ne veulent pas l’indépendance, mais être partie intégrante du Mexique, être des Indiens mexicains. « Nous pensons que celui qui conquiert le pouvoir par les armes ne devrait jamais gouverner, car il risque de gouverner par les armes et par la force. Celui qui recourt aux armes pour imposer ses idées est certainement très pauvre en idées. » « Nous sommes soldats pour qu’il n’y ait pas de soldat. » « Nous voulons avant tout la paix. Je le répète, nous ne voulons pas le pouvoir, ni même devenir un parti politique. Il y en a déjà assez. » « En tant qu’indiens nous voulons avoir la possibilité de construire, au sein de la nation mexicaine, notre propre réalité différenciée. »
Marcos refuse de définir l’EZLN comme un mouvement révolutionnaire mais plutôt comme « rebelle social », c’est-à-dire qui transforme peu à peu les choses à partir du bas, sans se poser la question de la prise du pouvoir.
« La globalisation voudrait diviser le monde en trois zones : la zone des gérants et des entrepreneurs ; la zone des usines de montage et des entreprises à main-d’oeuvre nombreuse et mal payée ; et la zone des « jardiniers ». » Ces derniers sont condamnés à faire les travaux les plus pénibles, à extraire les matières premières des mines par exemple. Ceux qui ne trouvent pas leur place dans l’une de ces trois zones sont de trop.
L’arme principale de l’EZLN n’est pas le fusil mais la parole. Les passe-montagnes masquent des visages qu’on ne voyait pas. « Les indiens étaient « invisibles », inexistants. Paradoxalement, c’est en masquant nos visages qu’on nous a vus et que nous sommes devenus visibles. » Lui-même ne se considère pas comme leader : « Marcos n’aura été qu’un combattant de pas. C’est pourquoi je dis toujours : si tu veux savoir qui est Marcos, qui se cache sous son passe-montagne, prends un miroir et regarde-toi, le visage que tu y découvriras, c’est celui de Marcos. Car nous sommes tous Marcos. »
Brève introduction au zapatisme, parfaite pour appréhender à la fois l’originalité et les paradoxes de ce mouvement mais aussi son influence internationale.
MARCOS - LA DIGNITÉ REBELLE
Conversations avec le sous-commandant Marcos
Ignacio Ramonet
Traduction des propos du sous-commandant Marcos par Laurence Villaume
82 pages – 9 euros
Éditions Galilée – Collection « L’Espace critique » – Paris – Avril 2001
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