S’inscrivant dans une tradition de lutte de plus de
500 ans et après avoir tenté par tous les moyens légaux de faire entendre les
droits du peuple mexicain, l’Armée Zapatiste de Libération Nationale (E.Z.L.N.) prend les armes le
1er janvier 1994 et déclare la guerre au mauvais gouvernement.
Dans la première Déclaration de la jungle Lacandone,
les insurgés zapatistes posent leurs revendications qu’ils résument en deux
mots « Ya basta ! » (« Ça suffit ! ») et qu’ils précisent
par une série de lois :
-
La loi
sur les impôts de guerre abolit les impôts et en impose un à tous les
civils tirant profit du peuple et de ses activités.
-
La loi
agraire révolutionnaire vise à restaurer la propriété communautaire des
terres fixée par la Constitution de 1917, amendée en 1991 par l’introduction
d’un droit à l’appropriation privée. Au-delà d’une certaine surface, les
propriétaires sont expropriés et leurs terres rendues aux coopératives pour la
production collective des aliments nécessaires au peuple mexicain.
-
La loi
révolutionnaire sur les femmes leur donne le droit de décider du nombre
d’enfants qu’elles désirent, de choisir librement leur conjoint.
-
La loi
de réforme urbaine supprime l’impôt foncier et le loyer, réquisitionne les
bâtiments vides.
-
La loi
du travail, la loi sur l’industrie et
le commerce, la loi sur la sécurité
sociale et la loi sur la justice s’appliquent
tout autant à protéger le peuple mexicain.
Les nombreux communiqués de presse qui suivent
rendent compte, non sans humour, des nombreuses tentatives de manipulation du
gouvernement fédéral, de l’intense répression subie, des conditions de vie des
populations et des combattants, des campagnes de dénigrement, des assassinats. Le
sous-commandant Marcos, rédacteur de ces textes débattus collectivement,
s’adresse tour à tour aux journaux, à diverses personnalités nationales ou
étrangères, aux étudiants, aux enfants, aux autres peuples indigènes,… pour
éclaircir les exigences de Liberté, de Justice et de Démocratie. Il exige la
tenue d’élections libres.
Les tentatives de cessez-le-feu seront sans cesse violées
par l’armée fédérale. Les négociations du printemps seront l’objet de pressions
incessantes et de contre-vérités diffusées par la presse, pour déstabiliser les
rebelles. Finalement, les 32 propositions du Gouvernement en réponse aux 34
revendications zapatistes, seront soumises à une consultation nationale
organisée par le Comité Clandestin Révolutionnaire Indigène (C.C.R.I.) et
rejetées à 97,88%.
La deuxième Déclaration de la jungle Lacandone se
réclame d’Émiliano Zapata qui affirmait que « c’est aussi en lançant des
idées rédemptrices, des phrases de liberté et des anathèmes terribles sur les
bourreaux du peuple que s’effondrent les dictatures, que s’effondrent les
empires ». Elle décrète un cessez-le-feu unilatéral afin de permettre à la
société civile de s’organiser pour parvenir à une transition
démocratique par une convention nationale démocratique qui devra déboucher
sur de nouvelles élections, un gouvernement de transition et une nouvelle magna carta qui reprendrait les
principes essentiels de la Constitution de 1917, reconnaissant à l’ensemble des
mexicains le droit à un toit, à la terre, au travail, à la nourriture, à la
santé, à l’enseignement, à l’information, à la culture, à l’indépendance, à la
démocratie, à la liberté, à la justice et à la paix.
L’ E.Z.L.N. ne se rend pas, elle résiste car la
dignité ne se rend pas. Les insurgés zapatistes sont les ruisseaux de montagnes
qui descendent dans la vallée pour faire gronder les rivières. Mais les
ruisseaux n’ont pas de chemin de retour. Rien pour eux. Tout pour tous. Leur
vrai choix est la paix digne ou la guerre digne.
Le mauvais gouvernement leur répond par le mensonge
et la guerre.
La convention nationale aura bien lieu mais avec une
pression militaire constante. Arrestations, tortures, attentats, assassinats se
multiplient.
Les élections du 21 août connaitront des fraudes record.
Le P.R.I. aurait dépensé 1 250 millions de dollars pour sa campagne, soit 25
fois plus que Clinton pour la sienne aux États-Unis !
L’E.Z.L.N. rompt alors le dialogue. Ainsi s’achève
ce premier volume, avec les derniers communiqués et les dernières lettres
d’octobre 1994.
Cette première compilation de toutes les proclamations de l’E.Z.L.N.
et du C.C.R.I. est forcément parfois répétitive mais rend bien compte de
la grande intégrité des insurgés, de leur désir de changer le monde sans prendre le pouvoir. À
côté d'abondantes données chiffrées démontrant les injustices que subit le peuple mexicain, on
trouve des textes plus poétiques, emprunts du réalisme magique caractéristique
de la littérature d’Amérique Latine, ce qui leur donne un souffle original. Le sous-commandant Marcos les parsème de poèmes,
d’anecdotes et d’histoires comme celle de Durito, le petit scarabée à lunettes
qui fumait la pipe.
Véritables pages d’histoire d’une révolution contemporaine toujours vivante, indispensables pour se forger sa propre opinion face aux montagnes de
contre-informations publiées ici ou là.
¡ YA BASTA !
Les insurgés zapatistes racontent un an de révolte au Chiapas.
Sous-commandant Marcos
Traduit de l’espagnol par Anatole Muchnik
482 pages – 150 francs
Éditions Dagorno – Paris – 1994
Texte complet de La Première Déclaration de la Forêt Lacandone :
http://cspcl.ouvaton.org/spip.php?article14
Seconde Déclaration de la Forêt Lacandone :
http://cspcl.ouvaton.org/spip.php?article15
Voir aussi :
Texte complet de La Première Déclaration de la Forêt Lacandone :
http://cspcl.ouvaton.org/spip.php?article14
Seconde Déclaration de la Forêt Lacandone :
http://cspcl.ouvaton.org/spip.php?article15
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