14 septembre 2016

DÉGRAISSEZ-MOI ÇA !


Égal à lui même, Mickaël Moore signe une charge virulente contre les liquidateurs du rêve américain. Avec le même ton sarcastique et excessif qu’il utilise dans ses films, il s’en prend aux « dégraisseurs » en quête d’infinis profits et à leurs complices, les politiciens qui leur accordent impunité et subventions, aux terroristes économiques comme aux délinquants en col blanc.


À ceux qui veulent renvoyer les immigrés, il démontre que seuls les Amérindiens sont de vrais américains et à la rigueur les passagers du Mayflower. Les autres ne sont finalement que des descendants d’immigrés !

À ceux qui dénoncent les assistés, il désigne les entreprises qui touchent chaque année 170 milliards de subventions directes tout en licenciant, délocalisant, fraudant le fisc, détruisant l’environnement alors que la totalité des programmes sociaux (allocations familiales et logement,… ) ne représentent que 50 milliards de dépenses annuelles et profitent majoritairement à des personnes qui traversent une mauvaise passe (pas plus de 2 ans).

Aux Noirs de Los Angeles, il conseille d’aller incendier quelques villas à Beverly Hills pour commémorer les émeutes de 92 et leur dessine même un plan pour qu’ils ne se perdent pas.


Avec le sens de l’excès qu’on lui connaît et qui irrite certains, il contacte une association anti-avortement et propose à ses membres d’élargir leur combat de défense de la vie aux spermatozoïdes, en allant manifester devant les résidences étudiantes aux heures de diffusion d’Alerte à Malibu.

Il propose également de fonder une société de gestion de centres pénitentiaires (à peine parodique) pour utiliser les immenses locaux abandonnés  par l’industrie automobile à Flint, en employant les ouvriers licenciés, dans leurs anciennes tâches et pour 10% de leur anciens salaires.

Après que Gorbatchev ait mis fin unilatéralement à la guerre froide, il suggère au Président et à l’État Major quelques nouveaux ennemis potentiels pour pouvoir de nouveau consacrer 50% du budget à une course aux armements stérile et oublier le chômage.

Il demande au Consulat d’Afrique du Sud de leur envoyer Nelson Mandela pour qu’il débarrasse les États-Unis de la ségrégation raciale qui y sévit encore.

Toujours sur le mode de la dérision, il pousse la logique capitaliste jusqu’à l’absurde : puisqu’une entreprise doit faire du profit avant toute autre considération, il conseille donc à General Motors de vendre du crack.

 
C’est drôle et instructif. Mickaël Moore utilise le rire pour provoquer la prise de conscience. Ses excès et ses simplifications ont le mérite de la pédagogie et pourront certainement toucher autrement que de longs exposés théoriques. Tous les leviers sont bons !




DÉGRAISSEZ-MOI ÇA !
Mickaël Moore
Traduit de l’américain marc Marc Saint-Upéry.
226 pages – 6 euros.
Éditions 10/18   collection Fait et cause - Paris – février 2004

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