Un dossier a particulièrement retenu notre attention
dans ce numéro hivernal : « La 7ème arme », élaborée
et utilisée pendant les « guerres coloniales » et que l’on nous
dégaine de nouveau.
C’est Mao Tsé-Toung qui, en 1936, invente le concept
de « guerre révolutionnaire », doctrine qui vise à transformer les
civils en armes, en désignant un ennemi intérieur. Le Lieutenant-colonel
Lacheroy la découvre et l’étudie en Indochine, utilisée par les Viêt-Minh, en
1951 puis va l’enseigner aux officiers de l‘armée française. Il s’inspire
également des travaux du sociologue Serge Tchakhotine, auteur du « Viol
des foules par la propagande politique », ouvrage censuré à sa publication
dont nous essaierons de rendre compte prochainement. Quadrillage du territoire
par une hiérarchie parallèle, renseignement, utilisation de la terreur et de la
propagande pour gagner l’adhésion des populations, c’est pendant la bataille
d’Alger que la méthode fera ses preuves. Interdite en 1962 par De Gaulle, après
le putsch des généraux, elle sera cependant exportée aux États-Unis pour être
appliquée en Amérique Latine. Pendant 18 mois, avant le génocide au Rwanda, les
forces spéciales françaises aideront le gouvernement à mettre en place la
colonne vertébrale de l’appareil génocidaire : dénonciation d’un ennemi intérieur
par la propagande de la radio des Mille collines, création de milices,
enrôlement de la population, équipement en armes… Résultat : d’avril à
juillet 1994, entre 800 000 et un million de personnes seront massacrées.
Après le 11 septembre 2011, les États-Unis ont
défini la nouvelle ère post guerre froide sur le principe « avec nous ou
contre nous » qui ne fait plus de différence entre l’ennemi extérieur et
l’ennemi intérieur. C’est le paradigme de la « guerre contre le terrorisme ».
Dans le nouveau livre blanc de la défense nationale, en 2008, Nicolas Sarkozy
reprend cette doctrine pour la France. En 2013, François Hollande décide de ne
rien changer. Et après les attentats contre Charlie Hebdo, l’Hyper casher de la
Porte de Vincennes puis le Bataclan, c’est ce même discours qui accompagne la
mise en place de l’état d’urgence.
La mise en perspective historique de cette méthode
de manipulation des populations est percutante. L’enquête de Jake Raynal est fort
instructive. Les 10 pages consacrées au Rwanda sont remarquables et constituent
un résumé éclairant d’une responsabilité occultée. Le parti pris en noir et
blanc de David Servenay est pertinent pour retracer ces pages sombres de
l’histoire récente.
« La Grande illusion » démontre les
manipulations des chiffres des chômages pour contenir leur hausse. On comprend
en détail ce que l’on sait parfaitement (en principe).
D’autres dossiers sont bien entendus intéressants
mais ne relèvent pas du cadre de ce blog.
LA REVUE DESSINÉE #14
Collectif
228 pages – 15 euros
Éditions La Revue Dessinée – Paris – hiver 2016-2017
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